Comment définiriez-vous le plaisir de travailler?
Pour moi, c’est se lever le matin avec l’envie d’aller travailler, avec le sentiment d’accomplir quelque chose d’utile et d’exercer une influence positive par son action. Je vous donne un exemple: nous venons d’organiser, avec la Haute école spécialisée bernoise, un évènement public intitulé «Your Stage – Le festival dédié aux mondes du travail des plus de 60 ans». Les préparatifs ont pris beaucoup de temps, mais quand je vois les solutions créatives que nous avons été capables de trouver en trois jours pour répondre à l’allongement de la durée de la vie professionnelle, je pars heureuse en week-end et j’ai hâte de me remettre au travail.
Vous accompagnez des personnes qui désirent changer de vie professionnelle pour réaliser leur rêve. Sont-elles nombreuses à le faire de nos jours?
La tendance est aux plans de carrière qui s’écartent du modèle linéaire classique ou vertical, ou qui le complètent. On voit des cadres renoncer à certaines responsabilités en fin de carrière pour remplir d’autres fonctions ou réaliser des projets personnels parallèlement à leur emploi. On voit aussi des personnes entrecouper leur carrière de phases de repos ou d’apprentissage, et cela dès le début de leur vie professionnelle. Certaines n’ont plus les mêmes intérêts et s’orientent vers quelque chose de tout à fait nouveau au milieu de leur vie. Si la durée de vie est appelée à se confondre avec la durée du travail et que nous restons actifs pendant 60 à 70 ans, nous pourrons alors évoluer dans le sens qui nous convient le mieux. Il est probable que les jeunes qui entrent aujourd’hui sur le marché du travail changeront au moins huit fois de métier dans leur vie; leur carrière ressemblera à une suite de vagues ou à une spirale plutôt qu’à une ligne droite.
Comment prendre un nouveau départ professionnel?
Un nouveau départ ou une reconversion demande de la souplesse. Il est recommandé de faire le point régulièrement dans sa tête, d’accepter les idées nouvelles pour concevoir ensuite un projet de vie en adéquation avec ses désirs et son identité. Cette démarche permet d’ailleurs de casser des routines qui nous sont néfaste. Parfois, ce n’est pas le travail lui-même qui lasse, mais la manière d’organiser le quotidien en fonction de ses besoins. Prendre un nouveau départ, surtout si l’on n’a plus 25 ans, implique en outre de se préoccuper de sa situation financière et de sa retraite. Nous suggérons toujours de consulter un spécialiste et d’établir un plan financier, surtout si l’on envisage de devenir indépendant.
Dans les entreprises, les générations se côtoient. Mais sont-elles complémentaires?
Dans la plupart des entreprises, quatre générations se côtoient: un faible pourcentage de baby-boomers, autrement dit les personnes nées entre 1946 et 1964, 35% de personnes issues de la génération X, 35% issues de la génération Y et 12% issues de la génération Z, qui démarre en 1996. Si je disais que les aînés sont plutôt comme ceci et les plus jeunes, plutôt comme cela, que leurs compétences sont complémentaires, je ne ferais que renforcer certains stéréotypes. Chaque personne, quel que soit son âge, peut être ouverte au changement, créative, lente ou rapide.
De nos jours, c’est avant tout les personnes de la génération X, nées entre 1965 et 1980, et toujours plus aussi celles de la génération Y, nées entre 1981 et 1995, qui détiennent le pouvoir. Je les invite à exercer leur pouvoir pour encourager les possibilités de développement à tout âge, la sécurité psychologique au sein des équipes et l’apprentissage mutuel entre les générations.